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L estime de soi

L estime de soi est un sujet largement abordé, parfois même un peu trop, car ajouté à des « recettes » de développement personnel et forcément éloigné du sens qu’il revêt.

Alors qu’est-ce que l’estime de soi comment se construit-elle?

Elle repose tout d’abord sur le modèle de la théorie de l’attachement de John Bowlby, psychiatre et psychanalyste britannique ( 1907-1990). La mère, premier objet d’attachement est celle qui répond au besoin de sécurité et de réconfort, l’enfant va alors utiliser ce socle pour partir à la découverte de son environnement et d’autres figures car il sait qu’il peut revenir en toute confiance vers sa mère.

Le besoin de sécurité et de réconfort sont les bases de l'estime de soi

L’estime de soi se fonde sur le sentiment de sécurité de l’enfant

Ces MIOS (Modèles Internes Opérants) se forment à partir des relations que l’enfant a interiorisés avec l’autre. Ils sont formés à partir des représentations mentales de soi, de l’autre et du monde qui sont issues des échanges avec l’entourage familial (Miljkovitch, 2001).
L’attitude du parent aux émotions désagréables ressentis par l’enfant est un facteur déterminant pour le développement de ces MIOS internes surtout en situation de détresse ou de menace, ceux-ci lui permettant de garder un sentiment de valeur, facteur essentiel quant à la construction de l’estime de soi.

A partir de l’empreinte de ces modèles intériorisés, l’enfant va aller à la conquête et la découverte du monde et des autres. Plus l’attachement aura été sécure dans la relation à sa mère, plus il a le sentiment d’être protégé par celle-ci en cas de menace. Il peut alors s’éloigner d’elle et accepter son absence physique.

C’est grâce à cette nouvelle confiance acquise qu’il va pouvoir découvrir d’autres environnements et faire de nouvelles expériences d’attachement notamment à l’école.
L’attachement permet donc en favorisant l’exploration, une bonne estime de soi ainsi que l’accès à la compétence (Guedeney, N. 2011)l’enfant va intérioriser les apprentissages scolaires selon son type d’attachement sécure, évitant/anxieux, ambivalent-désorganisé.

En quoi le style d’attachement est-il déterminant dans la construction de l’estime de soi?

Lorsque l’attachement est sécure, l’enfant construit un modèle interne qui le fait sentir comme digne de confiance. Comme il a été amené à tester ce modèle, il élabore alors progressivement au grès des expériences qu’il vit dans la relation aux autres et à son environnement social, un sentiment de valeur même dans des situations de vulnérabilité et d’émotions négatives.
Une attention securisante, une présence contenante permet de construire une image positive de soi et d’aller ainsi vers l’autonomie .

Malheureusement, il n’en est pas toujours ainsi, il existe des situations familiales dramatiques faites d’abandon, de maltraitances, de parents défaillants qui ne permettent pas à l’enfant de se construire une bonne image d’eux-mêmes. Des conséquences et séquelles physiques et psychiques induisent des traumatismes très mortifères quant à la construction d’un équilibre psychique avec une image de soi très négative. Heureusement, rien n ‘est figé, il est possible de se (re)construire même en partant avec un déficit important.
Pour se sentir être une personne « intéressante, significative », il faut d’abord avoir lu dans le regard de ceux qui nous ont regardés, cette valeur, cette importance, voire unicité.

Quels sont les facteurs qui fragilisent l’estime de soi?

Estime de soi et surmoi tyranique

Avoir une mauvaise estime de soi

Une mauvaise estime de soi résulte de plusieurs aspects, le sentiment de ne jamais se sentir à la hauteur, de ne pas se reconnaître de qualités, de mettre toujours l’accent sur ce qui a été raté, pas fait, mal fait avec le sentiment que le regard de l’autre vient amplifier ce ressenti. Beaucoup de personnes ont tendance à se dévaloriser , à considérer qu’ils ne sont jamais assez bien par rapport à un idéal qui reste très souvent assez flou et surtout fantasmé.Cet idéal du Moi est issu de plusieurs facteurs.

Devant les difficultés de la vie, hélas, ces personnalités avec une estime plutôt basse vont avoir souvent beaucoup plus de difficultés à absorber les émotions car se jugeant incapables de faire face, c’est un cercle vicieux qui ne fait qu’entretenir la mauvaise image qu’ils ont déjà d’eux-mêmes.

Le critique intérieur, c’est-à-dire un surmoi tyrannique induit un comportement d’auto-flagellation faisant le lit de conduites d’auto-sabotage.
Une remarque au travail, un collègue qui ne dit pas bonjour et le film intérieur se met en route  » c’est de ma faute, qu’ai je fait de mal? ».
Ces personnalités à faible ou basse estime vont être très dépendantes du regard de l’autre et de son jugement ou supposé jugement. Beaucoup de projections vont être faites, ce qui entretient la mauvaise image de soi et la culpabilité avec ce sentiment de ne jamais se sentir à la hauteur.

Dictature de l'image et réseaux sociaux : les impacts sur l'estime de soi

Les réseaux sociaux et l’emprise sur l’estime de soi

La dictature de l’image, des réseaux sociaux, l’ultra consumérisme de relations, d’objets hyper connectés et le désir de plaire et de répondre absolument à des normes sociales maintiennent bon nombre de personnes dans l’illusion que le bonheur et la valeur ne peuvent dépendre que de ces critères. C’est dangereux quant à l’équilibre psychique.
Les diktats de la société, des médias, des réseaux sont un piège puissant car ils laissent croire à chacun que ce qu’ils proposent sont des références absolues. C’est un ravage pour l’estime de soi et cette fragilité risque d’être accentuée par des situations d’échecs répétés, de ruptures ou d’épreuves de la vie. Si l’estime de soi est déjà plutôt basse,, elle ne peut être protectrice et aider à la résilience.

L’ultra compétition ainsi que le sentiment de déshumanisation permanent dans le milieu professionnel, l’exigence de résultats mettent en danger l’estime de soi ainsi que les valeurs profondes qui habitent chacun.

La société propose des modèles auxquels chacun devrait être sensé appartenir afin d’obtenir l’approbation du groupe auquel cas, il y aurait un risque de rejet voire d’ostracisme, raison pour laquelle, le groupe social et la façon dont chacun peut se sentir y appartenir, regardé ou jugé par lui, est un baromètre puissant.
Le risque c’est qu’il peut être soumis à des fluctuations importantes en fonction de l’humeur de chacun, de son histoire personnelle et de ce que le regard des autres peut réactiver comme blessures notamment de rejet. A contrario, plus le sujet va se sentir être reconnu, avoir une place, plus l’estime sera à la hausse. Le danger est de faire dépendre son bien-être que de cette boussole. Les nourritures sociales et affectives pèsent d’ailleurs probablement plus dans la bonne estime de soi (être apprécié) que les réussites matérielles (être performant).

Une estime de soi plutôt fragile amène à maintenir un faux self, à se dissimuler derrière des masques et des jeux de rôles. Pour beaucoup, c’est une lutte effrénée contre soi-même visant à camoufler les failles et induisant des ruminations anxieuses .

Dans les relations amoureuses, la menace est de faire reposer sur l’autre son équilibre psychique et de penser avoir de la valeur que parce que quelqu’un est supposé en donner, la dépendance affective est une des manifestations du manque d’estime de soi. Un travail avec un psychanalyste ou psychothérapeute s’avère être essentiel pour comprendre ce qui se joue derrière ces failles narcissiques.

Cette soumission parfois très sournoise qui s’insinue dans les vies de personnes vulnérables sur le plan narcissique les maintient dans une attente sans fin de reconnaissance et de valeur qui ne vient jamais ou très peu.

D’autre chemins existent pour avoir et trouver de la valeur, malheureusement, l’écart entre cette idéal souvent précaire et surtout superficiel et illusoire et la réalité des vies de chacun, aggrave ce sentiment d’incompétence voire d’incomplétude. Réaliser l’importance de ce décalage entre les deux et la frustration et souffrance que cela induit est déjà le début d’une prise de conscience importante de deuils de soi à faire, c’est un chemin indispensable pour aller vers une meilleure connaissance de ses mécanismes, se réapproprier ses valeurs et les mettre en cohérence avec son soi profond.

Ce qui nourrit l’estime de soi

L’estime de soi n’est jamais quelque chose d’homogène ni de figé.Un adulte peut s’auto évaluer de manière positive et se dévaloriser sur d’autres aspects. Une bonne estime de soi donne le sentiment d’être bien avec soi-même, d’avoir des interactions sociales saines et de regarder la vie avec lucidité et acceptation, de même avec tous les aléas et épreuves qui la traverse.
Le besoin d’être satisfait de soi, de se sentir efficace, compétent de ce qu’on est ou de ce qu’on a fait est une des composantes de l’estime de soi. Cela suppose être apprécié et reconnu das divers registres, travail, activités, hobbies, relations etc.

Toutes ces nourritures ne sont pas acquises une bonne fois pour toute, elles sont mouvantes, raison pour laquelle, entretenir ces différents facteurs contribue à maintenir un bon socle intérieur, suffisamment solide pour affronter le réel et ses difficultés, déceptions, trahisons, pertes, échecs etc…

Se dire qu’on est pas défini par ce qu’on accomplit uniquement, c’est ce que la société veut bien laisser croire.

Essayer d’entendre les voix de l’enfance qui ont été bienveillantes avec soi et si cela n’a pas été le cas, tenter d’aller les chercher en s’entourant de gens respectueux, à l’écoute et partageant les mêmes valeurs.
Regarder ses dons cachés, souvent laissés en friche, se rappeler qu’ils sont des parties de soi vivantes et que toute personne a une vraie valeur.
Faire ce qui nous est cher reste une priorité le plus souvent possible sans tomber dans la culpabilité.

Une étape clé est d’avoir une vision claire de soi et des parties de soi qu’on apprécie moins, la perfection étant impossible à atteindre, le changement ne peut conduire qu’à l’acceptation de soi-même avec indulgence et bienveillance.

L’action, moteur de l’estime de soi

C’est parce qu’on a une bonne estime de soi que l’action est d’autant plus envisageable. La confiance en soi étant une des composantes de l’estime de soi, elle donne le sentiment d’êrte capable d’entreprendre, d’oser, de se lancer et de réussir et si ce n’est pas le cas, de recommencer sans baisser les bras.
Les personnes à faible estime d’elle-même ont tendance à procrastiner, à avoir une vraie difficulté à identifier leurs désirs, leurs besoins et à agir ensuite.
Le bien-être émotionnel, la stabilité favorisent l’estime de soi et procure ce sentiment intérieur de cohérence avec soi.

Rien ne peut changer sans ancrage et confrontation à la réalité. On peut toujours se réfugier dans le fantasme et se dire que ce sera possible plus tard, ce mécanisme de défense et stratégie d’évitement sont des facteurs de maintien de la mauvaise image de soi.
C’est en agissant que la confiance se construit mais aussi en se confrontant à ses peurs. Le constat de réalisations même minimes sont essentiels, il s’agit que ce soit régulier.
Le chemin vers la (re)construction de l’estime de soi peut être long, difficile et parsemé d’embûches notamment quand la base est déficitaire mais rien n’est impossible, il ne s’agit pas de chercher la réussite à tout prix mais d’accepter de regarder chaque pas comme une victoire et de ne pas s’identifier à ses peurs mais au contraire, d’avoir une vision de soi beaucoup plus large et globale en mettant l’accent sur ce qui avance.

Et si cette route est trop laborieuse , ne pas hésiter à se faire accompagner d’un thérapeute.

A lire

Christophe André, Imparfait, libre et heureux, Pratique de l’estime de soi, Odile Jacob 2006.
Christophe Andre et François Lelord, L’estime de soi, s’aimer pour mieux vivre avec les autres, Odile Jacob.
Guy Corneau, Le meilleur de soi

Virginie Ferrara

Psychothérapeute à Paris, je vous reçois à mon cabinet rue Vignon, Paris 9ème, sur rendez-vous au 01 53 20 09 31